Complément de retraite : qui finance ? Mise au clair sur les responsabilités

Une femme d'âge moyen et un homme âgé examinent des documents de pension

Trois chiffres, trois réalités : en 2024, le taux de remplacement moyen des nouveaux retraités flirte avec les 52 %, près de 60 % des Français s’inquiètent de leur niveau de vie futur, et le Plan d’Épargne Retraite (PER) a déjà séduit plus de 7 millions d’épargnants en moins de cinq ans. Derrière ces données, une question s’impose : qui finance réellement ce fameux « complément de retraite » ?

Depuis 2019, les employeurs disposent de plusieurs cadres fiscaux pour aider leurs salariés à préparer leur avenir, mais la portabilité des droits, elle, se heurte souvent à des frontières rigides dès qu’on change d’entreprise. Côté PER individuel, l’histoire est différente. Aucun euro versé par l’employeur ; ici, tout repose sur les épaules du travailleur. Pourtant, la carotte fiscale attire de plus en plus d’indépendants, bien décidés à sécuriser leur futur.

Impossible d’y voir clair sans regarder le rôle de chacun. Certains dispositifs collectifs reposent sur un effort partagé entre salarié et entreprise, d’autres sont entièrement financés par l’employeur. Les règles, parfois obscures, varient d’un secteur à l’autre. Au bout du compte, ce sont souvent les subtilités fiscales et légales qui font la différence sur le montant réel reçu à l’heure du passage à la retraite.

Pourquoi la retraite supplémentaire est devenue incontournable

Le système de retraite par répartition français, hérité du Conseil national de la Résistance, a longtemps reposé sur une logique simple : chaque génération d’actifs paie pour la précédente. Mais la belle mécanique s’est grippée. La population vieillit, l’espérance de vie s’allonge, et le nombre d’actifs diminue face à celui des retraités. D’après la DREES et le COR, ce déséquilibre n’est plus une exception, mais bien la règle.

Les multiples réformes, 1993, 2003, 2010, 2014, puis 2023, n’ont fait que repousser un mur : celui du déficit. Le fameux taux de remplacement, indicateur du rapport entre la pension de retraite et le dernier salaire, fond : au-dessus de 70 % dans les années 90, il s’effondre sous les 50 % pour les générations nées après 1990. La jeunesse actuelle doit intégrer l’idée d’une pension nettement inférieure à ses attentes, même en repoussant l’âge du départ.

Face à ce paysage, la retraite supplémentaire se présente comme une solution incontournable. Les régimes de base et complémentaires peinent à garantir le niveau de vie. Entreprises et indépendants multiplient donc les stratégies : PER, dispositifs collectifs, plans individuels. Chacun tente de reconstituer un filet de sécurité, alors que la promesse d’un maintien du pouvoir d’achat à la retraite s’éloigne un peu plus chaque année.

Qui finance quoi ? Décryptage des acteurs et des mécanismes

En France, la retraite complémentaire fonctionne sur une logique collective. Pour les salariés du privé, le pilier s’appelle Agirc-Arrco. Depuis la fusion en 2019, ce régime unique gère la quasi-totalité des droits à la retraite complémentaire dans le secteur privé. L’employeur doit affilier chaque salarié à l’organisme compétent et gérer les cotisations, part salariale et part patronale, via la Déclaration Sociale Nominative (DSN).

Les agents non titulaires de la fonction publique dépendent, eux, de l’Ircantec, gérée par la Caisse des dépôts et consignations. Même principe : cotisations partagées entre employeur public et agent, règles proches de celles du privé.

Voici comment se répartissent les rôles dans le financement :

  • Employeur : il gère l’affiliation, calcule, prélève et verse les cotisations.
  • Salarié : une part est prélevée directement sur le salaire brut.
  • Organismes gestionnaires : Agirc-Arrco pour le privé, Ircantec pour les agents publics non titulaires, CNAV pour la retraite de base.

La DSN centralise toutes les déclarations et facilite le suivi. Chaque euro versé, chaque point de retraite acquis, se retrouve tracé dans un système interconnecté. La gestion collective reste la règle, mais la transparence s’améliore. Chacun sait qui fait quoi, et où va l’argent.

Panorama des dispositifs existants : quelles options pour les salariés et les indépendants

La retraite supplémentaire s’impose pour pallier la baisse du taux de remplacement. Depuis la loi Pacte, la gamme des outils s’est étoffée, offrant aux salariés comme aux indépendants des solutions adaptées à leur parcours et à leurs besoins.

Pour mieux cerner les options disponibles aujourd’hui, voici les principales formules à disposition :

  • PER individuel (PERin) : accessible à tous, il permet d’alimenter sa retraite selon son rythme et ses moyens. Les versements sont déductibles du revenu imposable dans la limite des plafonds fixés par la loi.
  • PERCOL (ex-PERCO) : dispositif collectif mis en place par l’employeur, il accueille l’intéressement, la participation et l’abondement. Il favorise une épargne retraite sur la durée, avec des modalités de sortie assouplies depuis la réforme.
  • PERO (ex-Article 83) : réservé à certaines catégories de salariés, il impose des cotisations obligatoires et prévoit généralement une sortie en rente, avec des avantages fiscaux intéressants lors de la phase d’épargne.

Les indépendants ne sont pas en reste. Le PER individuel leur donne la main sur leur capitalisation, adaptée aux variations de revenus. Les travailleurs non salariés (TNS) peuvent aussi cotiser à titre volontaire pour étoffer les dispositifs de la SSI ou de la CNAVPL selon leur profession.

Des dispositifs anciens existent encore pour des profils précis. L’Article 39 cible une poignée de cadres dirigeants, leur assurant un niveau de pension défini à l’avance. L’Article 82 autorise des cotisations volontaires, mais avec des avantages fiscaux limités. Cette diversité traduit la complexité du système, mais aussi la nécessité d’adapter la stratégie à chaque situation professionnelle.

Groupe de professionnels âgés discutant en plein air en ville

Avantages, limites et impacts : ce qu’il faut savoir avant de se lancer

La retraite supplémentaire séduit pour sa souplesse et ses bénéfices fiscaux. Sur un PER individuel, par exemple, les versements réduisent la base imposable. Le PERCOL, lui, permet d’accéder à l’abondement de l’employeur, un bonus qui attire autant les cadres que les salariés non-cadres. À la clé : une source de revenus supplémentaire à la retraite, pour limiter la chute du pouvoir d’achat.

Les dispositifs collectifs s’inscrivent aussi dans la politique de rémunération des entreprises. PEOPLE BASE CBM, cabinet de conseil RH, insiste sur leur rôle dans la fidélisation et la motivation des équipes. Des plateformes comme WAAGE PRO donnent aux salariés la possibilité de simuler les effets de ces dispositifs sur leur futur pouvoir d’achat, et d’optimiser la gestion de leurs droits.

Mais il existe des freins. Plafonds de déduction, fiscalité à la sortie, choix entre rente et capital : chaque produit a ses règles, et la portabilité n’est pas toujours simple lors d’un changement d’employeur. Les droits sont dispersés entre plusieurs acteurs (Alliance Professionnelle Retraite, Agirc-Arrco, Audiens pour la culture), ce qui nuit à la clarté d’ensemble.

L’employeur, lui, doit gérer une lourde charge administrative : déclarations sociales, information des salariés, suivi des droits, anticipation des départs. Pourtant, la retraite supplémentaire s’impose comme un atout décisif dans la bataille des talents, surtout dans les grandes agglomérations où la concurrence sur les salaires est féroce.

Au bout du compte, préparer sa retraite ne relève plus d’une simple formalité. C’est un choix stratégique, une question de trajectoire professionnelle et de lucidité face aux réalités du système. Reste à chacun de décider comment il entend écrire la suite de l’histoire, avant que la ligne d’arrivée ne s’impose d’elle-même.